La condition des personnes exilées à Paris : 8 années de violences policières et institutionnelles
Il y a 3 ans, les violences quotidiennes que vivent les personnes exilées à Paris ont été mises au grand jour lors de l’évacuation brutale d’un campement de 500 tentes place de la République, entraînant des condamnations au plus haut niveau de l’État.
En dehors de cette séquence d’indignations unanimes, ces violences perdurent dans le plus grand silence et se poursuivent sous différentes formes : harcèlement, évictions de lieux de vie, destructions de biens, violences verbales et physiques… Elles sont très largement sous-documentées car elles se produisent généralement dans des lieux isolés, à des heures ‘invisibles’ la nuit ou tôt le matin et sans témoins, rendant difficile le recueil de preuves pour envisager d’entreprendre un recours. À cela s’ajoutent le sentiment d’impuissance, la peur des représailles et la certitude que la parole policière n’aura pas le même poids que celle des personnes exilées.
Le Collectif Accès au Droit, créé en début d’année 2023, documente ces atteintes aux droits et mène un travail d’observation des expulsions et des violences policières commises à l’encontre des personnes exilées à Paris et dans sa proche périphérie, avec la triste conviction que l’approche des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris va accélérer ces pratiques et ce nettoyage social de l’espace public.
Cette démarche se veut dynamique et collaborative afin que chacun·e, à titre individuel ou au nom d’une organisation, puisse faire un signalement, apporter un témoignage et contribuer au recueil de données de l’association.
À ce jour, nous avons comptabilisé et documenté 448 témoignages de violences policières commises envers les personnes exilées entre 2015 et 2023. Ce travail, loin d’être exhaustif et systématique, met en lumière une présence policière disproportionnée, qui contrôle, harcèle, disperse et invisibilise les exilé·es. Parmi ces violences, 88% relèvent de situations d’évictions, de dispersions dans l’espace public, 33% de confiscations ou destructions de biens et 30% d’agressions physiques.
En parallèle, nous avons réalisé ces dernières semaines une enquête flash sur les 6 principaux lieux de campement des personnes exilées à Paris qui confirme ces premiers résultats : sur les 103 personnes interrogées, 79% déclarent avoir été victimes de violences policières, et 78% l’ont été à plusieurs reprises.
1 – Franceinfo, le 24 novembre 2020, “Evacuation violente d’un camp de migrants à Paris : le rassemblement place de la République est terminé, heurts mineurs en fin de manifestation”. Accessible en ligne ici.